Essaie sur l’inefficacité des mouvements sociaux
Peter Gelderloos est un militant américain anarchiste. Comment la non-violence protège l’Etat (2005) préfacé par Dupuis-Déri (l’auteur de Black Block) est une analyse des tactiques usant de la violence.
Peter Gelderloos ne prône pas la violence mais une diversité de tactique au sein des mouvements sociaux afin de dédramatiser l’usage de celle-ci. L’organisation sociale néolibérale capitaliste est intrinsèquement violente. Gederloos met en perspective la violence des manifestations avec la violence structurelle de l’Etat. L’Etat, qu’il soit démocratique ou non, est le système le plus meurtrier qui ait existé comme ce sont les États qui créent des guerres, des génocides, la police et les violences qui en découlent. Le but de l’auteur est donc non pas de dire que les tactiques non violentes sont inutiles, mais de dénoncer les personnes qui combattent la violence de manière dogmatique.
Da la préface, Dupuis-Déri distingue 2 formes de violences:
- la violence institutionnalisée
- la violence de la résistance
Soit une violence de l’oppression et une violence de la libération, donc une violence légale et une violence considérée illégale.
“L’Etat distribue des médailles et il érige des monuments pour célébrer la violence d'assassins en uniformes, connus ou inconnus, pendant ce temps des militantes et militants s’entredéchirent au sujet de la violence qui marquerait les luttes sociales et populaires. Leur sensiblerie éthique est à ce point exacerbée qu’une simple pince à découper est associée à la violence.” Il y a là un double standard: pourquoi qualifie-t-on de violence le fait de déboulonner des statues de Christophe Colomb sans vouloir voir la violence que représente la statue elle-même?
Gelderloos avance qu’il faut une diversité des tactiques. Toutefois les “pacifistes” veulent condamner la violence. Gelderloos condamne une dénonciation arbitraire de la violence sans la questionner. Il donne de multiples exemples d’actions, de mouvements violents qui ont abouti à des révolutions ou des résultats grâce à la diversité des tactiques dont font partie les actions violentes. Il donne beaucoup d’exemples historiques détaillés comme l’obtention de droits civiques aux Etat-Unis pour les personnes noires ou encore la lutte contre la colonisation Britannique en Inde.
Gelderloos montre qu’il y a une falsification de l’Histoire, notamment à travers des figures comme Gandhi, Nelson Mandela ou Rosa Parks érigé.e.s comme figure de la non violence. Leurs actions ont été falsifiées et déformées au nom de doctrines de la non violence. Il est hautement problématique d’utiliser de telles figures pour justifier des positions pacifistes. Alors que les personnes citées comme pacifistes était non pacifiste et ne prônaient pas la violence d’une part et d’autre part, les résultats obtenus par des groupes violents qui auront un fort impact dans les mêmes luttes seront totalement ignorés.
Cette logique permet aux groupes privilégiés de conserver leurs privilèges. Il démontre ce système de privilèges à travers plusieurs chapitres. Celles et ceux qui veulent influencer le système pour le modifier sont, à la base, suffisamment privilégiés pour accéder ou s’approcher des positions de pouvoir de ce même système. De plus, le confort des pacifistes étant garanti par un système profondément meurtrier et violent, vouloir profiter de ce système violent d’une part et se dire non violent d’autre part est contradictoire.
Ce système de privilèges est exploré dans plusieurs chapitres. Il explore également le rapport aux médias ainsi que les stratégies (la voie à suivre, comme les règles d’un jeu pour atteindre un objectifs) et les tactiques (les actions pour arriver au résultat tracé par la stratégie). Les débats pour savoir si telle tactique ou telle autre doit être utilisée pour arriver à un objectif, le débat porte sur savoir si la tactique est moralement bonne ou non et le débat ne porte plus sur savoir si les tactiques permettent d’arriver ou non à l’objectif visé.
Ce livre est accessible, y compris pour les personnes non habituées des concepts politiques énoncés plus hauts. Il utilise un vocabulaire facilement compréhensible qui permet de sortir d’un entre-soi militant et permet également à des personnes non-militantes de s’initier à ces thématiques sans être trop simpliste.
Voici la liste des chapitres et des grands thèmes abordés par Gelderloos:
La non violence est inefficace.
La non violence est raciste
La non violence est étatiste
La non violence est patriarcale
La non violence est tactiquement et stratégiquement inférieure
La non violence est illusoire
L’Alternative: Possibilités pour un activisme révolutionnaire
Prix: 16 euros ou 23 CHF